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Entre Vérité et Excellence, la racine

Il m'aura fallu ces deux semaine de silence pour replacer certaines priorités dans leurs écrins respectifs. Obnubilé par l'aspect communicatif de l'écriture, j'ai bien failli sombrer dans un gouffre que je n'ai jamais senti s'ouvrir sous mes pieds. Celui de la complaisance.

Je n'en ai pas parlé dans "Se donner le droit d'écrire". La complaisance est pourtant un grand fléau de l'art.

Lorsque je parle, justement, de se "donner le droit d'écrire", j'estime qu'il y a plusieurs niveaux d'écriture. Choisir d'écrire ne résulte pas immédiatement en une production de chefs d'oeuvres. La belle écriture est une rareté. La première étape, la plus simple, consiste à prendre la plume et à noircir le papier. C'est la seconde étape, celle consistant à ne pas sombrer dans la complaisance, qui se révèle ardue.

Car après s'être "donné le droit d'écrire", il faut exiger de soi-même une indéfectible recherche de l'excellence. C'est là, contre la racine de l'art, que j'ai trébuché. Et c'est peut-être là, aussi, que la friction entre le monde éditorial et l'art d'écrire produit le plus de flammèches. L'un vous encourage à plaire au lecteur, l'autre, à répondre à vos critères d'excellence. À trop les entretenir, ces étincelles auront tôt fait de tout brûler. Il faut choisir. Ennuyant, non ? Il faut choisir. Écrire des banalités que tous liront, qui seront partagées et encensées du fait même qu'elles sont faciles à saisir et qu'elles ressemblent aux banalités marinant dans le bouillon commun, ou bien écrire des vérités, au meilleur de nos capacités, et se satisfaire de ce qu'elles ont été mises en mot, même si elles passent inaperçu.

La nécessité d'écrire est une réalité couramment exprimée par les écrivains, mais je la vois souvent traduite par une sorte de boulimie d'écriture, comme si l'auteur devait mettre des mots, des dunes de mots, pour se sentir vivant.

Ce n'est pourtant pas ce qui est requis de l'écrivain. Ce n'est pas sa nécessité propre. C'est une autre nécessité, celle d'une obsession ou d'une névrose. Mais pas celle de l'écrivain.

Devoir écrire à tout prix, en écriture, ça ne mène à rien. Ça ne mène qu'à une accumulation de cahiers où s'enchaînent, griffonnées à la hâte, une surenchère d'inepties.

Écrire des montagnes d'idioties qui ne correspondent à aucun véritable effort littéraire, ça ne fera de personne un auteur.

La nécessité de l'écrivain se terre dans une toute autre lumière.

Sa seule et unique obsession doit être la suivante : exprimer le Vrai de la meilleure façon. Et c'est ici que la complaisance brûle.

Je constate, après une réflexion un peu amère, mais nécessaire, que j'ai fourni davantage de charge au plateau du Vrai qu'au plateau de l'Excellence. Ancré à l'idée de produire des textes hebdomadaires pour le blog, puis de produire un guide d'écriture (il faut constater l'ironie de la chose), je me suis lancé dans une recherche du Vrai qui a garrotté ma recherche de l'Excellence. Mes mots sont devenus un peu fades. Mes propos ont perdu du lustre.

Évidemment, j'écris différemment ici, sur ce blog. Mes textes littéraires, mes romans, mes poèmes, je m'y consacre avec un sérieux qui est impossible à transmettre ici. Ces mots que j'écris à l'instant, je les publierai d'ici une trentaine de minutes, après une unique relecture, et sans trop me demander si j'ai atteint la limite du cours de mes pensées. Même chose pour le guide. Je cherchais à écrire un document à la lecture facile.

Pourtant, ça m'embête. J'ai l'impression d'avoir pris quelque chose pour acquis. D'avoir cru, pendant un court instant, que l'assurance du mot qui s'égoutte dans un trait d'encre est une marque suffisante de sa nécessité. Ce n'est pourtant pas le cas. Et c'est en constatant que ce relâchement initié par le blog s'infiltrait dans mes écrits que j'ai résolu d'y mettre un terme (au relâchement, non au blog). Le resserrement mettra sans doute quelques semaines à s'effectuer, mais j'espère que la qualité qui en émergera sera palpable.

D'ici là, j'invite les auteurs entre vous à vous questionner sur la nécessité qui vous habite. Il n'y a pas de honte à écrire pour plaire. Ceci dit, il serait difficile de qualifier une telle écriture d'excellente. Il existe une raison fondamentale pour laquelle la littérature banale meurt en quelques années. Elle est remplacée par une autre littérature banale, dans un cycle sans fin de recherche de plaisir, en l'occurrence, celui de la lecture. Le livre vrai, lui, est impossible à remplacer. Et c'est bien ce genre de livre que j'entends, pour ma part, écrire.

Une semaine pleine de clarté à chacun de vous !

Félix


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